En Indre-et-Loire, où le marché du travail est en tension, des entreprises locales ont pu pallier leurs problématiques en termes de recrutement en découvrant une nouvelle source de candidats, atypique pour certains recruteurs. France Travail a récemment mis en place un forum d’Insertion par l’Activité Économique (IAE) au sein de la maison d’arrêt de Tours. À la tête du projet, Sophie Mairel, conseillère justice de l’agence France Travail locale : "Ce forum proposait des candidats aux entreprises d’insertion car ce sont des tremplins pour la majorité des détenus afin de retrouver le milieu ordinaire."
Une expérience à laquelle a été convié Julien Quintard, directeur de l’entreprise d’insertion Déclic, laquelle est spécialisée dans l’entretien d’espaces verts. "Les travailleurs que l’on recrute sont éloignés de l’emploi. Nous les accompagnons sur une durée maximum de deux ans vers un emploi stable ou une formation diplômante dans le milieu ordinaire", explique-t-il. Ce forum, fruit d’un partenariat entre le Service Pénitentiaire d’Insertion et de Probation (SPIP) ainsi que les conseillers accompagnement, entreprise et la psychologue du travail de France Travail, a été l’occasion de faciliter les recrutements auprès d’un public qui rencontre souvent des difficultés.
Favoriser les rencontres entre détenus et entreprises d’insertion
Afin de proposer un recrutement fiable et de qualité, France Travail a réalisé en amont du forum IAE un travail de sourcing permettant de répondre aux besoins des entreprises d’insertion ainsi que des ateliers avec les conseillers et la psychologue du travail. "Il y a eu un atelier dédié à la conception d’un CV et la psychologue a travaillé sur la confiance en soi et la préparation à l’entretien", résume Sophie Mairel. Une étape importante pour la conseillère justice qui travaille étroitement avec le SPIP afin d’aider les détenus à réintégrer le monde du travail.
Concrètement, le forum IAE a accueilli huit entreprises et vingt détenus le temps d’une demi-journée. Ces derniers ont pu déposer leur CV, échanger avec les gérants des structures d’insertion, et participer à de courts entretiens de recrutement. "Nous avons invité des entreprises d’insertion car elles travaillent sur le champ professionnel et social. Le but était d’organiser un entretien plus poussé à l’approche de la sortie", note Sophie Mairel. "Une entreprise d’insertion repose sur les mêmes règles qu’une entreprise classique à la différence qu’un travailleur social va intervenir pour accompagner les salariés", ajoute Julien Quintard. Afin de remplir leur mission sociale, les entreprises d’insertion se voient allouer une aide au poste par l’État, et ici par le Conseil Départemental en Indre-et-Loire, qui finance les surcoûts liés à la formation et à l’accompagnement des salariés.
Une initiative qui accompagne autant les candidats que les employeurs
Recruter des demandeurs d’emploi issus du milieu pénitentiaire implique de prendre en compte des problématiques spécifiques et d’adapter les critères de recrutement. "L’idée est d’éviter de juger dès le départ sur les compétences techniques. À la place, on se concentre sur la posture des candidats, leur motivation et les savoir-être", souligne la conseillère justice. Même son de cloche pour Julien Quintard : "Je m’assure que les savoir-être permettent aux candidats de s’intégrer correctement dans nos équipes car il faut assurer un niveau de qualité similaire à une entreprise de même type."
Dans le cas où les freins des candidats dépassent ses compétences, le directeur peut compter sur d’autres acteurs : "S’il y a trop de freins, que ce soit la mobilité ou le logement, je n’hésite pas à les réorienter vers les chantiers d’insertion qui sont plus adaptés à leur situation. Le forum IAE était aussi l’occasion pour lui de découvrir le milieu pénitentiaire qui lui était encore inconnu : « Le but était de comprendre comment les détenus sont accompagnés en sortie de détention pour travailler en partenariat avec le personnel du SPIP. »
Un travail partenarial efficace pour un recrutement fiable
À l’issue du forum IAE, l’entreprise Déclic a pu embaucher un détenu qui répondait à ses besoins et ses attentes. "Même si le candidat connaît quelques freins, Julien Quintard le soutient et l’accompagne sur le logement et sur son avenir professionnel, s’enthousiasme Sophie Mairel. Sur l’ensemble, il y a eu des réussites et l’on souhaite instaurer ces rencontres plus régulièrement." L’expérience reste globalement positive, explique Julien Quintard : "Ça se passe très bien en entreprise. Le candidat est compétent avec un savoir-faire et savoir-être excellents malgré les problématiques sociales qu’il peut rencontrer." Une réussite qu’il attribue aussi au travail de sourcing et d’organisation réalisé par France Travail.
Pour autant, l’employeur n’est pas seul pour accompagner le détenu. "Nous pouvons compter sur les conseillers de France Travail et les salariés du SPIP qui suivent les détenus, souligne Julien Quintard. Se mettre en réseau, c’est s’assurer que le recrutement en entreprise d’insertion soit un succès." Un travail d’équipe et des liens que la conseillère justice souhaite mettre à profit lors de futurs forums pour faciliter le recrutement de détenus.