Une course d’orientation pour recruter autrement

L’agence Pôle emploi de Trignac a mis sur pied un atelier innovant : faire participer recruteurs et demandeurs d’emploi à une chasse à l’emploi. Comprendre : chercher des balises et se rencontrer dans un autre univers. L’assistante des Ressources Humaines de l’entreprise Adhap, Aurélie Blandin, l’a testé en mai, et en redemande !

Comment faire participer et mettre à l’aise les plus jeunes demandeurs d’emploi dans un processus de recrutement ? Face à l’absence d’une solution pleinement satisfaisante, l’agence Pôle emploi de Trignac a mis sur pied son propre atelier l’été dernier : les ateliers Chasse pour l’emploi, où le temps d’échange informel est roi. « On arrivait difficilement à les faire participer à des actions classiques type forum ou job dating. On a réfléchi à quelque chose qu’on pourrait faire en extérieur » raconte Marlène Lunel, l’une des conseillères Pôle emploi à l’origine de l’atelier.

Comment se déroulent ces ateliers Chasse pour l’emploi ? Dès le départ, tout le monde se découvre autour d’un café d’accueil, pour donner le ton de la convivialité. Les groupes sont constitués, les règles du jeu expliquées et les dossards remis. Il n’y a plus qu’à aller parcourir le parc paysager de Saint-Nazaire à la recherche de « balises-questions ». Ces balises posent des questions sur l’emploi et sur les valeurs du travail (Que pensez-vous des profils débutants, parlez-moi d’une activité importante pour vous, etc.), ce qui alimente les discussions entre employeurs et candidats, même si tout se fait assez naturellement grâce aux groupes réduits qui sont constitués. D’après Aurélie Blandin, qui a participé à l’atelier pour l’entreprise Adhap : « J’ai fait le chemin avec des candidats donc ça permet de créer un petit lien. On fait connaissance, ils racontent leurs parcours, on parle de nos structures. » 

Chasse à l'emploi à Saint-Nazaire

Aurélie Blandin « Les candidats sont concentrés sur le jeu, c’est moins conventionnel, ça permet à tout le monde d’être plus libre. Et pas voir le chargé de recrutement comme d’habitude… puisqu’on a tous le même dossard. »

Un recrutement plus naturel

Et c’est là que la magie opère. Hors du cadre d’un entretien formel, l’assistante RH a vécu une belle expérience sur le plan humain : « Quand on passe un entretien on est stressé. Là c’est plus naturel comme méthode. Les candidats sont concentrés sur le jeu, c’est moins conventionnel, ça permet à tout le monde d’être plus libre. Et de voir le chargé de recrutement autrement… puisqu’on a tous le même dossard. » Selon elle, il faut participer à cet atelier avec un état d’esprit libéré des modalités de recrutement traditionnelles : « Il faut être accessible, enlever les barrières, être ouvert d’esprit, être joueur. C’est un choix de personnalité, puis une vision du recrutement. » Les entreprises doivent aussi être davantage disposées à prêter attention aux savoir-être plutôt qu’aux savoir-faire.

À l’issue de l’atelier, les employeurs refont des présentations succinctes, avant que les candidats ne remettent leurs CV pour les postes qui ont retenu leur attention. L’expérience vécue en amont change le rapport entre recruteurs et candidats, et le tutoiement est de mise : « Ça permet de se rendre compte que les recruteurs sont des gens normaux. Les candidats posent des questions qu’ils n’auraient jamais posées en entretien » rapporte Marlène Lunel, conseillère Pôle emploi de l’agence de Trignac.

Renouer la confiance

Et pourquoi inventer un nouvel atelier, alors qu’il existe des dispositifs similaires comme Pass’Sport pour l’emploi ? « C’est plus long à mettre en œuvre, il faut aller voir la fédération et obtenir des accords. Le but c’est aussi de ne pas avoir quelque chose de sportif, car intégrer une activité sportive peut prendre du temps pour certaines personnes » détaille Marlène Lunel, conseillère Pôle emploi, qui reconnaît tout de même que ces ateliers sont complémentaires.

Ce sont les entreprises des secteurs économiques les plus en tension qui ont été conviées lors des trois premiers ateliers organisés : santé et social, transport et logistique, hôtellerie-restauration, et industrie. Aurélie Blandin, dont l’entreprise propose des services d’aide à la personne, a des besoins de recrutement réguliers « car de nombreuses personnes à domicile ont besoin d’une assistance de vie. » Dans ce secteur d’activité qui va continuer à prendre de l’ampleur avec le vieillissement de la population, elle sait néanmoins que certains postes peuvent effrayer. L’atelier Chasse pour l’emploi permet de dépasser certaines craintes, d’après elle : « J’ai rencontré une candidate qui avait une très mauvaise première expérience dans ce secteur de l’aide à la personne. D’elle-même elle n’aurait jamais postulé, alors que le fait d’avoir eu un échange l’a aidée. Aujourd’hui, elle est en poste pour nous et ça se passe très bien. » Au total, sur les deux personnes qui ont laissé leur CV à Aurélie Blandin à la fin de la rencontre, l’une a été embauchée en CDI, et l’autre en CDD de remplacement.

Et le succès de l’atelier imaginé en Loire-Atlantique pourrait bien s’exporter à l’ensemble des départements français, d’après Marlène Lunel : « Des collègues d’autres régions nous ont demandé des infos. Le produit est fait donc c’est assez simple à mettre en œuvre. »